L'attirance physique - Comment ça fonctionne ?
- Salammbô Hotte
- 11 oct. 2020
- 6 min de lecture
« Elle a les yeux bleus, Bélinda »
Elle a aussi le front blond, cette Bélinda. Pourquoi Claude François nous parle – t – il de ça ? Certainement parce que ce sont les yeux de cette Bélinda qui l’a attiré en premier. Ce sont ses yeux et ses cheveux qui lui plaisent, qui le séduit. (Mon but n’était pas de vous mettre la chanson dans la tête pour la journée, mais de faire une super entrée en matière 😉)
Mais vous êtes-vous demandé pourquoi ça le séduit ? Vous êtes-vous demandé si vous aviez un « type » d’homme ou de femme ? Savez-vous ce qui vous a séduit/séduite chez votre conjoint ? Vous êtes-vous demandé comment fonctionne l’attirance ?
Ici, je réponds à toutes ces questions.
Un peu d’évolution…
Pour comprendre l’attirance, il faut d’abord comprendre les bases de l’évolution. N’ayez pas peur, on ne va pas partir dans des concepts très compliqués.
L’évolution, c’est quoi ? C’est la façon dont chaque espèce a évolué au fil du temps pour améliorer sa valeur adaptative (également appelé la fitness). La valeur adaptative d’une espèce ou d’un individu représente sa capacité à survivre et à se reproduire. Par exemple un animal avec une taille corporelle imposante aura possiblement une meilleure valeur adaptative, puisqu’il gagnera plus facilement un combat. Ce caractère (taille corporelle) sera sélectionné, il s’agit de la sélection naturelle puisque seuls les animaux ayant une forte corpulence survivront. Ils amélioreront leur valeur adaptative. En d’autres termes, la sélection naturelle correspond à la conservation des caractères permettant d’améliorer la valeur adaptative d’une espèce. C’est ce mécanisme, qu’au fil des années devient l’évolution.
Alors pourquoi je vous parle de ça dans un article dédié à l’attirance ? Simplement parce que les traits qui nous attirent chez une personne sont la résultante d’années d’évolution et de sélection naturelle pour améliorer notre valeur adaptative. Oulah, je sens que je vous ai perdu là 😉
Je vous propose dans le paragraphe suivant quelques exemples pour y voir plus clair.
La sélection sexuelle : quelques exemples
La sélection sexuelle est une sorte de sous-catégorie de la sélection naturelle, mais n’en est pas moins fondamentale. Il s’agit de la sélection d’un partenaire ayant les caractéristiques reflétant une bonne valeur adaptative, un bon patrimoine génétique, une bonne santé et aussi une certaine capacité à s’occuper de la descendance.
L’exemple le plus commun est celui des oiseaux. Les oiseaux sont des espèces très colorées, or certains vont avoir des pigments plus intenses que d’autres. Plus il y aura de pigments plus la couleur sera vive. Ces pigments sont liés aux caroténoïdes qui proviennent de l’alimentation. Il a été démontré à de nombreuses reprises que les femelles ont tendance à choisir des mâles aux couleurs très vives pour s’accoupler. Pourquoi ? Les caroténoïdes venant de l’alimentation, plus l’animal sera de couleur vive plus sa capacité à trouver de la nourriture sera révélée. De même, plus il trouve de la nourriture plus il sera en bonne santé, surtout que les caroténoïdes sont intimement liées au système immunitaire.
La couleur vive chez les oiseaux est donc gage d’un bon patrimoine génétique, d’un système immunitaire compétent et d’une réelle capacité à trouver de la nourriture et donc de nourrir ses petits. Ces mâles seront sélectionnés pour s’accoupler, c’est la sélection sexuelle.
Ici la vivacité de la couleur des plumes est donc déterminante mais ce n’est pas le cas de toutes les espèces. Pour les éléphants de mer, les mâles vont se battre et la femelle sélectionnera le gagnant tandis que chez les cerfs ça sera le brâme du mâle qui sera important. Chez le paon, c’est la longueur des plumes de sa queue qui aura un rôle lors de la parade nuptiale. Chez l’Homme ça sera le ratio taille-hanche par exemple. En résulte de cette sélection sexuelle soit une course à l’armement lorsqu’elle génère une compétition entre mâles pour séduire la femelle ou une course à l’ornementation lorsque la parade nuptiale détermine le choix du partenaire. Chacune de ces caractéristiques ne sont pas anodines, elles reflètent un réel avantage pour la valeur adaptative de l’espèce.
La sélection sexuelle chez l’Homme, autrement dit : l’attirance
Je ne sais pas si vous commencez à saisir l’idée, mais je suis désolée de vous apprendre que concernant le choix de votre partenaire, de votre femme, de votre ex, etc. votre libre arbitre est assez altéré… Et oui… la raison pour laquelle vous avez craqué pour votre conjoint il y a 10 ans, ce n’est pas parce qu’il vous a plu à vous. C’est parce que vous êtes issus de longues années d’évolution qui vous font choisir (entendez «être attiré par») des critères assurant une bonne progéniture. En réalité tout est assez inconscient, vous ensuite attribuez ce qui vous a plu à ce que vous connaissez. En revanche, on ne connait pas la part que prend l’évolution dans le choix du partenaire.
Alors, par quoi somme-nous attirés ? Comme pour le reste du règne animal, l’Homme va sélectionner des caractéristiques révélant une bonne santé, un bon système immunitaire… en somme, un bon patrimoine génétique mais également des traits de fertilité (i.e. valeur reproductive). Mais comment se reflètent – ils chez l’humain ? C’est ce que nous allons détailler dans le paragraphe suivant.
Exemple de l’odeur corporelle
Vous en avez peut-être déjà entendu parler, l’odeur corporelle est un facteur très important dans la sélection sexuelle chez l’humain. Mais pourquoi ? L’odeur de votre partenaire va être le reflet à la fois de son état de santé mais aussi de sa valeur reproductive. De plus, l’odeur serait un facteur permettant d’éviter la consanguinité.
Lors d’une étude, des hommes ont été séparés en deux groupes : un groupe avec une alimentation riche en fruits et légumes, sans viande rouge et un groupe avec une alimentation riche en viande rouge.
Le groupe de femme devant juger les odeurs qu’elles préféraient ont sélectionné les hommes ayant une alimentation riche en fruits et légumes. Une forte consommation de fruits et légumes étant représentatif d’une bonne alimentation et donc d’une bonne santé, c’est ce facteur qui est traduit dans l’odeur corporelle, qui devient alors un critère de sélection.
Pour plus de précisions, rappelons que les fruits et les légumes sont riches en caroténoïdes. Ces caroténoïdes sont très importants pour le système immunitaire et essentiels pour la synthèse de la vitamine A. Une forte consommation de fruits et légumes reflète donc une bonne santé.
En revanche, on ne peut pas conclure sur la viande rouge. Bien que nous sachions aujourd’hui les impacts néfastes d’une surconsommation de viande rouge pour la santé (augmentation des maladies cardiovasculaires, cancers colorectaux, etc.), ce n’était pas le cas ancestralement. Les réflexes que nous avons, liés à l’évolution correspondent à des valeurs ancestrales. À l’époque, la viande rouge était rare et permettait d’accumuler beaucoup d’énergie. C’est donc le facteur « quantité de consommation de fruits et légumes » qui est reflet ici d’une bonne santé et qui prend donc part dans le choix de notre partenaire.
Une autre étude a démontré une relation entre les hormones et l’attractivité. Les hommes seraient plus attirés par l’odeur des femmes lorsque celles-ci ont un taux d’œstradiol très élevé et un taux de progestérone très faible. Cela correspond aux périodes où les femmes sont le plus fertiles. Sans le savoir, les hommes sont attirés par la valeur reproductive des femmes.
D’autres facteurs physiques entrent en compte de la même façon dans la sélection sexuelle chez l’homme. Chacun reflète soit la santé soit la valeur reproductive. Pour en citer quelques-uns il y a : la symétrie faciale, le ratio taille-hanche chez la femme, la teinte de la peau, la poitrine, la musculature, le ratio épaule-taille chez l’homme, …
Pour conclure, l’attirance physique s’explique par des réflexes évolutifs mis en place depuis des milliards d’années afin d’améliorer notre valeur adaptative. Toutefois, la sélection sexuelle s’inscrit dans la sélection naturelle (rappel : lors de la sélection naturelle, les gènes n’étant pas adaptés à l’environnement disparaissent, n’étant pas sélectionnés). Or, de nos jours, la sélection naturelle se trouve altérée par la médecine, permettant à la majorité des patrimoines génétiques de survivre, qu’ils soient adaptés ou non à l’environnement. Quand est-il alors de la sélection sexuelle ? La part de nos réflexes évolutifs dans la sélection de notre partenaire est-elle en déclin ? La sélection sexuelle, est-elle amené à disparaitre chez l’Homme ?
Bibliographie
1. Švegar, D. (2016). What does facial symmetry reveal about health and personality? Polish Psychological Bulletin, 47(3), 356–365. doi:10.1515/ppb-2016-0042
2. Prokop, P. (2020). High heels enhance perceived sexual attractiveness, leg length and women’s mate-guarding. Current Psychology. doi:10.1007/s12144-020-
3. Pazhoohi et al. (2020). Effects of Breast Size, Intermammary Cleft Distance (Cleavage) and Ptosis on Perceived Attractiveness, Health, Fertility and Age: Do Life History, Self-Perceived Mate Value and Sexism Attitude Play a Role? Adaptive Human Behavior and Physiology. doi.org/10.1007/s40750-020-00129-1
4. Zuniga, A., Stevenson, R.J., Mahmut, M.K. & Stephen, I.D., Diet quality and the attractiveness of male body odor, Evolution and Human Behavior (2016), doi: 10.1016/j.evolhumbehav.2016.08.002
5. Garza. 2011. FERTILITY STATUS IN VISUAL PROCESSING OF MEN’S ATTRACTIVENESS. Thesis of psychology.
6. Garza et al. 2016. Male and Female Perception of Physical Attractiveness: An Eye Movement Study. Evolutionnary psychology. DOI: 10.1177/1474704916631614
7. Brierley M-E, Brooks KR, Mond J, Stevenson RJ, Stephen ID (2016) The Body and the Beautiful: Health, Attractiveness and Body Composition in Men’s and Women’s Bodies. PLoS ONE 11(6): e0156722. doi:10.1371/journal.pone.0156722
8. Confer, Perilloux, Buss. (2010). More than just a pretty face: men's priority shifts toward bodily attractiveness in short-term versus long-term mating contexts. Evolution and Human Behavior 31 348–353
9. « Darwin's prodigy », in The mating mind, Geoffrey Miller (chap. 2).
10. Cox C., Le Boeuf B., 1977, FEMALE INCITATION OF MALE COMPETITION: A MECHANISM IN SEXUAL SELECTION, The American Naturalist.
11. Lobmaier JS, Fischbacher U, Wirthmu¨ller U, Knoch D. 2018 The scent of attractiveness: levels of reproductive hormones explain individual differences in women’s body odour. Proc. R. Soc. B 285: 20181520. http://dx.doi.org/10.1098/rspb.2018.1520
Comments